térritoire zéro chômeur de longue durée
Témoignage Isabelle LOSS (Responsable
du projet TZCLD de Jouques).
Appel au Débat
«
Territoires zéro chômeur de longue durée » est un projet porté par ATD
Quart Monde en partenariat avec le Secours catholique, Emmaüs France,
Le Pacte civique et la Fédération des acteurs de la solidarité.
Une
association « Territoires zéro chômeur de longue durée » (TZCLD) a
ainsi été créée le 7 octobre 2016 pour la conduite opérationnelle de ce
projet, et démontrer qu’il est possible à l’échelle de petits
territoires, sans surcoût significatif pour la collectivité, de
proposer à tout chômeur de longue durée qui le souhaite, un emploi à
durée indéterminée à temps choisi, en développant des activités utiles
pour répondre aux besoins des divers acteurs du territoire.
Suite
à l’habilitation de 10 territoires expérimentaux par la loi du 29
février 2016, de nombreux territoires volontaires se sont mobilisée
pour mettre en œuvre la démarche.
La Responsable du projet TZCLD
de Jouques (Bouches du Rhône) nous présentera la philosophie du projet,
sa réalisation et animera un débat.
Le témoignage
Environ soixante-cinq participants
Isabelle
LOSS : vie professionnelle dans le domaine de l’orientation
professionnelle, A enseigné en faculté, piloté des études et missions.
En parallèle engagement dans le bureau de diverses associations.
Implantée
à Jouques, commune de 4600 habitants, proche d’Aix en Provence, à la
limite du Var, du Vaucluse et des Alpes de Haute Provence.
Aux
dernières élections municipales, elle se présente sur une liste
d’opposition au maire et est élue et présente au maire le projet TZDL.
L’idée fait son chemin.
En 1993, Patrick VALENTIN, à l’origine du projet TZDL,
fait le constat que nombreux sont les chômeurs de longue durée qui,
pour vivre touchent différentes allocations : allocations familiales,
allocation chômage et se demande si cet argent ne pourrait pas être
redirigé pour proposer aux chômeurs un travail.
En 2013, au sein
d’ATDT QUART MONDE, cinq territoires ont réfléchi sur ce problème :
créer des emplois supplémentaires dans ces territoires : quels sont les
interstices auxquels on n’a pas pensé, quelles seraient les filières à
créer et qui n’existent pas encore ?
Une conviction anime les participants : on ne peut pas œuvrer tout seul mais avec d’autres partenaires.
Les
interlocuteurs seront la mission locale, Pôle emploi, les chantiers
d’insertion, le conseil de territoire … on provoque des rencontres avec
ces partenaires pour expliquer le concept : certains sont emballés par
la perspective de créer des emplois supplémentaires et pérennes car il
ne faut pas revenir à la « case départ » (chômage).
Sur chaque
territoire, on a créé des comités locaux de réflexion. Parallèlement à
Paris, des élus agissaient et déposaient un projet de loi permettant le
financement, pour dix territoires, de CDI à temps choisi (10, 25, 40 h)
pour recevoir une contribution de 1800 € pour un équivalent temps
plein. A partir du début de l’année 2015 5 territoires se sont réunis
mensuellement pour faire avancer le projet. Un appel à projet a été
lancé fin 2016, 40 territoires ont répondu, ces cinq premiers
territoires (dont Jouques) et 5 autres sont retenus.
Le but est de créer des entreprises et d’embaucher des personnes.
A Jouques, les demandeurs d’emploi ont été contactés dès fin 2015.
En août 2016, le directeur est choisi et en fin d’année il dépose les statuts de l’association.
L’état
s’est engagé à hauteur de 1800€ par ETP (équivalent temps plein) mais
le SMIC coûte entre 2000 et 2100 €. Il y a en outre un local à assumer,
et un coût de fonctionnement, sans compter l’achat indispensable de
matériel. Il faut trouver de l’argent et c’est difficile.
On embauche quinze personnes mi-avril pour créer l’entreprise et fin avril, on distribue les premiers salaires.
Des
projets voient le jour : le début d’une « ressourcerie» – une offre
touristique à créer (visites guidées de la communes – promenades à
thèmes) – une offre agricole (ébourgeonnage des vignes).
Jouques
est une commune de 4600 h mais sa population s’accroît en raison de la
proximité d’Aix (25 km) que des gens veulent quitter pour mener une vie
plus naturelle. Sur cette population 2000 sont susceptibles de
travailler. Les entreprises locales proposent environ 400 emplois. Les
gens se déplacent en voiture pour sur les bassins d’emploi au-delà
d’Aix car les bus ne vont qu’au centre d’Aix. Il y a 170 demandeurs
d’emploi de longue durée sur environ 400 demandeurs d’emploi.
La
dynamique de l’agenda 21 en route à Jouques a permis de se poser la
question de savoir où l’on en est sur les plans social, économique et
environnemental.
Par ailleurs, nous échangeons avec la
commission extra - communale de l’emploi, on essaye de connaître les
complémentarités et de réfléchir à la manière de procéder.
Nous nous posons également la question de comment suivre et évaluer le projet ?
Le
rôle du directeur est multiple : gestionnaire – développeur d’activité
– Relations humaines – et il doit mettre des points de repères.
Mais il est bien entouré par une équipe de six personnes constituant
l’équipe projet (comité local) composé de trois élus et de trois
bénévoles.
A Jouques le projet a plusieurs composantes : l’EBE (Entreprise à But d’Emploi – Elan Jouques,
sous forme d’une association) avec 21 salariés, une équipe projet
qui défriche, anticipe, pilote et le comité local (commission extra
communale).
Il faut être vigilant car on ne doit pas concurrencer ce qui existe. Il faut réfléchir à des travaux supplémentaires.
De
nombreux candidats pour ces nouveaux emplois mais on doit aussi aider à
résoudre des problèmes (garde d’enfants, absence de voiture pour les
déplacements….) qui permettent de trouver un emploi en dehors de
Jouques. Au cours d’entretiens individuels on envisage le contexte, on
parle des conditions de travail, chercher la place où le candidat sera
le mieux. Pour aller plus loin un accompagnement est proposé par un
binôme des bénévoles. De nombreuses personnes qui sont passées par la
filière ont trouvé un emploi par elles-mêmes.
Une deuxième vague de territoires est en préparation.
Les questions qui se posent :
Actuellement
21 personnes sont embauchées. Mais pour embaucher plus il faut monter
d’autres activités, avoir plus d’éléments techniques ou matériels.
Avoir des professionnels qui trouvent des financeurs.
Le débat
Tous les bénéficiaires ont plusieurs activités :
une femme imprimeur a été volontaire pour se former à un logiciel pour
établir des fiches de paye. Et elle se lance dans les relations
humaines.
Une artiste participe à la
création d’une « ressourcerie » : activités autour de réparer, et
recycler les objets.
Quelques parcours professionnels sont très riches.
Il faut essayer de détecter toutes « les niches ».
La dynamique est très importante
Cette expérience est intéressante car elle augmente l’employabilité des chômeurs. Il faudrait pénétrer les services publics.
Q/ Pourquoi cette réussite ?
R/ une seule collectivité la mairie.
La
mairie est depuis peu aussi cliente : 3 fois par semaine les salariés
d’Elan nettoient les dépôts sauvages à coté des points de
collecte des ordures– par ailleurs, la commune a un réseau de 140 km de
chemins boises : un salarié d’Elan va faire le travail administratif en
amont du débroussaillage de part et d’autre des voies.
La loi précise
qui est éligible dans cette expérimentation : rechercher un emploi
depuis plus d’un an et résider dans la commune depuis plus de six mois.
Le financement est assuré par le gouvernement
Il faut rappeler que l’expérimentation est prévue pour cinq ans et l’évaluation commence dès maintenant.
Il faut repenser le travail de façon locale : c’est un changement d’état d’esprit.
Q/ Taux de réussite du deuxième entretien
R/
on souligne l’importance de la prise en compte du contexte des tâches.
On peut être doué mais pas dans n’importe quelles conditions.
Q/ Est-ce que les projets sont venus des gens ?
R/ Au départ, on a fait des réunions collectives pour avoir des idées.
Q/ Quelles proportions hommes/femmes ?
R/ Au
début 5 femmes et 10 femmes. Maintenant la proportion est moins
déséquilibrée mais il y a toujours plus de femmes et de tous les âges.
On voit beaucoup de « cassés de la vie ».
Q/ Comment équilibrer le budget?
R/ Dans
les travaux proposés, ce sont les clients qui paient. Dans d’autres
territoires il y a des propositions gratuites. Il faut compléter les
fonds de l’Etat. Le travail est rémunéré 11€ de l’heure (facturé au
client) cela évite le travail au noir
Il y a des travaux
saisonniers mais il est aussi important de pouvoir proposer aussi des
activités toute l’année pour que les gens ne soient pas payés à ne rien
faire
Q/ Quelle est la part de la formation dans ces activités ?
R/ Ailleurs
des entreprises ont commencé par une formation. A Jouques, les gens
sont souvent diplômés et reçoivent une formation interne.
Q/ Et ceux qui sont partis ?
R/ Certains sont partis mais pendant la gestation du projet. Personne n’a encore démissionné.
Q/ Quel est le pourcentage entre les subventions de l’Etat et les produits de l’activité vendus ?
R/ A la sortie, les activités ne s’équilibrent jamais. Il faut créer des activités solvables.
On court le risque d’avoir des gens qui s’installent à Jouques pour bénéficier de ce dispositif
Q/ Y a –t-il des projets similaires en Europe ?
R/ Non Mais la Belgique y prend intérêt.
Il n’y a pas d’autre réalisation en Occitanie. D’autres réalisations sont à Villeurbanne et Thiers
La loi oblige à être dans l’économie sociale et solidaire.
Le projet a été initié par ATD Quart monde et nous ont rejoint le Secours Catholique, Emmaüs, le Pacte civique…
Q/ Ou créer des projets?
R/ Il
faut créer ce système pour les territoires où les financements ont
possibilité d’être crées. Mais aussi il faut du temps car on prend à
rebours certaines notions couramment répandues.
Q/ Si à la fin de l’expérimentation une association est en difficulté ?
R/ L’Etat prendrait en charge toutes les dettes (licenciements….)
Q/ Avez-vous bénéficié de reportages dans les médias ?
R/ Oui, Antenne 2 et La Croix
Il y a des échanges entre les territoires d’expérimentation et c’est important car tout cela nécessite beaucoup d’énergies.
Q/ Quels critères de choix des postulants
R/ l’ordre chronologique et selon les besoins de compétence
Le débat continue :
Ethernaute : Vos reflexions nous
intéressent. Envoyez un
courriel à l'adresse suivante : aucafedelavie@free.fr.
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